La création d’une première usine est un tournant décisif dans la stratégie de développement d’une entreprise, en particulier pour les start-ups et les scale-ups industrielles. Elle symbolise le passage de l’idée à l’action, du prototype à la fabrication en série. C’est un projet structurant qui exige une connaissance fine des facteurs de succès, une planification rigoureuse et une bonne gestion des ressources disponibles.
Cet article s’appuie sur le retour d’expérience d’un dirigeant, Amaury Barberot, PDG d’Expliseat, qui a créé sa première usine en Pays de la Loire. Nous vous livrons ici les bases essentielles et les conseils pratiques pour réussir votre projet industriel. Du choix du site à la mise en service, en passant par la planification de la construction, la conformité réglementaire et l’optimisation de la production, chaque étape compte.
Focus sur les éléments clés à connaître pour construire une usine performante, durable et adaptée aux enjeux d’aujourd’hui.
Créer une usine : tout ce qu’il faut savoir avant de commencer
Avant de se lancer dans la création d’une première usine, il convient de se poser les bonnes questions. Définir une vision industrielle claire permet d’élaborer une stratégie qui va guider l’ensemble du projet : de la conception à la mise en production. Cette réflexion en amont permet d’éviter les erreurs coûteuses, les changements de cap en cours de route et de garantir l’alignement parfait entre l’outil industriel et les ambitions de l’entreprise.
A savoir !
Dans le cadre du plan d’investissement « France 2030 », un appel à projets Première Usine permet aux PME/ETI innovantes ou aux start-ups industrielles retenues, de bénéficier d’aides de financement afin d’accélérer leurs projets d’industrialisation.
Première usine : construction, reprise, mutualisation… quelle solution pour réussir ?
Avant même de penser béton, acier et grues, une question centrale s’impose : faut-il construire une usine de toutes pièces ou s’appuyer sur des solutions existantes ?
Construire une usine sur-mesure
Construire sa propre usine offre la liberté de concevoir un outil de production parfaitement aligné avec les besoins de l’entreprise : agencement des espaces, choix des matériaux, respect des nouvelles normes, technologies avancées, maîtrise des flux, anticipation sur les extensions prévues… C’est aussi un signal fort en termes d’image 4.0 et de réindustrialisation. Cependant, les délais sont longs (18 à 36 mois en moyenne*), les coûts plus importants et la mobilisation du capital peut paraître plus significative.
*Source : L’Usine Nouvelle
Notez que pour conserver son capital et faire le choix de l’investir plutôt dans le matériel ou le recrutement, une solution alternative existe : celle du portage immobilier. Il s’agit de faire construire une usine sur-mesure par un acteur tiers (société foncière, collectivité, promoteur) qui en reste propriétaire. L’entreprise occupe alors les lieux via un bail locatif, tout en bénéficiant d’un outil industriel dédié.
A savoir !
Solutions&co, l’agence régionale de développement économique, propose ce type de montage financier et accompagne les dirigeants de start-ups et de scale-ups dans la création de leur première usine.
Reprendre un bâtiment existant

Transformer un ancien site industriel présente des avantages concrets : investissement financier moins onéreux, foncier déjà viabilisé et installations parfois réutilisables presque en l’état. Cela permet également de s’engager dans une démarche vertueuse de recyclage urbain et d’inscrire son action au sein de la politique environnementale du ZAN, avec la zéro artificialisation nette des sols.
Outre ses convictions profondes liées à l’environnement, pour Amaury Barberot, PDG d’Expliseat, qui a fait ce choix pour sa première usine en Pays de la Loire, c’est aussi un gain de temps considérable.
« Nous avons gagné près de deux ans par rapport à une construction neuve, entre les études, le permis de construire, l’identification du foncier, la construction elle-même… La contrepartie, c’est qu’il faut s’ajuster au site existant ». Le choix du bâtiment et ses contraintes techniques sont donc à prendre en compte.
« Nous avons opté pour un grand hall, tout simple, qui permet d’être modulaire au fur et à mesure de la vie de l’usine, sans murs à abattre, ni conduits à contourner ».
Enfin, le fait d’avoir investi dans un site récent et qualitatif renforce aussi l’attractivité pour les clients et les collaborateurs : « C’est un vrai plus en termes d’images et un argument pour faire venir travailler les talents. »
Toutefois, reprendre un bâtiment existant peut aussi présenter quelques inconvénients, liés aux contraintes techniques et aux mises aux normes coûteuses.
Louer ou produire chez un tiers
La location de bâtiment permet de lancer la production rapidement, sans mobiliser trop de fonds propres. Trouver un partenaire industriel et produire chez un tiers permet également de tester le modèle, d’adapter les volumes à la demande, et de se concentrer sur son cœur de métier (R&D ou développement commercial). Cette solution est idéale pour les premières années d’activité, mais peut limiter la maîtrise des flux de production et des marges.
Mutualiser via une plateforme industrielle
Les plateformes industrielles mutualisées permettent aux jeunes pousses et aux entreprises innovantes, notamment, d’accéder à des infrastructures de pointe partagés (équipements technologiques, laboratoires, zones de test…), de bénéficier d’un accompagnement technique et d’une simplification administrative.
A savoir !
En Pays de la Loire, les Technocampus régionaux, Atlanpole Biothérapies, Neopolia ou encore l’IRT Jules Verne offrent ce type de services.
Concevoir son usine : penser flux, humain et environnement

Concevoir une usine, c’est bien plus qu’ériger des murs et installer des machines. C’est imaginer un lieu où cohabitent organisation, innovation technologique et esprit d’équipe.
Optimiser les flux de production
Quand on imagine une usine, on pense souvent aux machines et aux produits. Mais un des aspects les plus importants pour que tout fonctionne bien, ce sont les « flux » : c’est-à-dire la façon dont les matières premières, les pièces et les personnes circulent dans le bâtiment. L’implantation de l’usine doit répondre à une logique de fluidité. Cela commence par l’analyse fine du parcours des matières premières, des composants, des produits semi-finis et finis. Il faut éviter les croisements, les retours en arrière, les zones d’engorgement…
L’outil numérique, via des logiciels de simulation ou de jumeau numérique, permet de tester différents scénarios d’implantation avant de faire les choix définitifs.
Intégrer les nouveaux usages de travail
L’usine moderne n’est plus un simple atelier : c’est un lieu de vie. Elle peut intégrer des espaces collaboratifs pour les équipes de R&D et de production, des zones de prototypage, des salles de formation ou des laboratoires de test. À l’image de la nouvelle usine d’Expliseat en Pays de la Loire, pensée dès sa conception pour allier technologie avancée et confort d’usage, l’industrie de demain place l’humain et l’innovation au cœur de ses priorités.
L’usine 4.0 doit aussi s’adapter aux nouveaux usages du travail : open-spaces industriels, zones calmes, outils numériques partagés. Favoriser la circulation de l’information et des idées est aussi important que celle des matières. Chez Expliseat, deux lignes de production ont été installées, combinant robotisation et outils numériques de pointe, comme des scanners 3D pour les contrôles qualité ou des systèmes automatisés pour garantir une précision géométrique optimale. Le tout dans un environnement où l’ergonomie a été pensée pour améliorer le confort des opérateurs.
La qualité de vie au travail devient ainsi un véritable levier d’attractivité et de performance. Lumière naturelle, confort acoustique, sécurité, ergonomie des postes, accès aux transports ou aux services sont autant d’éléments différenciants,
Prendre en compte l’impact environnemental
L’intégration des enjeux environnementaux n’est plus une option. C’est un critère d’acceptabilité sociale, un impératif réglementaire et un argument commercial.
Dès la conception, il faut penser :
- Réduction de la consommation énergétique (isolation, éclairage LED, récupération de chaleur…)
- Maîtrise des consommations d’eau
- Gestion des déchets en circuits courts ou économie circulaire
- Utilisation de matériaux biosourcés ou recyclables pour le bâtiment
Une usine exemplaire peut devenir un levier d’image et un facteur d’attractivité pour les clients, les collaborateurs et les partenaires publics ou privés.
Piloter la création de l’usine et anticiper son exploitation

Se lancer dans la création d’une usine, c’est entrer dans une phase concrète, mais souvent semée d’imprévus.
Le succès de cette étape repose sur une gestion de projet rigoureuse, une communication fluide entre les parties prenantes et une anticipation précise de l’exploitation future du site industriel.
Sécuriser la gestion de projet
Dès le début des travaux (que ce soit de construction ou de réhabilitation), il est indispensable de nommer un chef de projet ou un AMO (Assistant à Maîtrise d’Ouvrage) pour orchestrer l’ensemble des prestataires et des interventions : bureaux d’études, architectes, entreprises du bâtiment, fournisseurs, collectivités…
« Chez Expliseat, notre premier recrutement a été un directeur de site, » précise Amaury Barberot. « Car ouvrir une usine ne s’improvise pas. Son expérience et ses compétences dans le domaine ont été essentielles. »
Ce référent joue un rôle clé dans le pilotage du projet :
- Suivre l’avancement du chantier
- Gérer les écarts entre le prévisionnel et le réel
- Coordonner les corps de métier
- Garantir le respect des délais, du budget et de la qualité
La mise en place d’un planning précis, avec des jalons clairs et des indicateurs de réussite, est un outil indispensable.
Intégrer la dimension réglementaire et sécuritaire
Les travaux engagés doivent être conformes aux normes en vigueur (urbanisme, sécurité, environnement). De même, l’usine doit respecter les obligations liées à son activité (ICPE, accessibilité, prévention incendie…).
Anticiper les démarches administratives et les contrôles réglementaires, en lien avec les collectivités locales, est essentiel pour éviter tout retard d’ouverture.
Pour Expliseat, deux audits particulièrement rigoureux liés à la filière aéronautique ont été réalisés.
« Ils ont permis de vérifier les technologies, les moyens alloués, les procédures, les modes de travail pour garantir que le produit qui quitte l’usine est fiable et conforme à la sécurité aéronautique. »
Prévoir les aléas
Des projets de travaux ou d’aménagement connaissent très souvent des imprévus : intempéries, retard de livraison, évolution de la réglementation…
Pour s’en prémunir, certaines recommandations sont utiles :
- Prévoir une marge de sécurité dans les délais
- Sécuriser plusieurs fournisseurs clés
- Intégrer des clauses de flexibilité dans les contrats
Une évaluation régulière des risques, couplée à des points d’étape formels, permet d’anticiper plutôt que de subir.
Anticiper l’exploitation dès la phase des travaux
Concevoir l’usine, construire les murs et aménager les espaces ne suffisent pas. Dès la phase des travaux, il faut penser à l’exploitation :
- Recrutement des opérateurs et des cadres
- Préparation des formations des équipes (procédures, sécurité, maintenance)
- Organisation de la logistique interne
- Informatisation des process et mise en place d’outils de supervision et de pilotage industriel (grâce aux ERP et aux logiciels MES)
Pour Amaury Barberot, cette anticipation a été déterminante dans la réussite du projet. Dès les débuts, une « petite ligne de production » a été mise en place pour lancer les premières fabrications, même à faible cadence et avec une efficacité limitée. Cela a permis d’identifier les difficultés concrètes du terrain avant d’installer une ligne plus performante.
« Grâce à cette phase intermédiaire, nous avons beaucoup appris de cette petite ligne de production. Nous avons pu débugger certains dysfonctionnements avant de s’équiper de moyens industriels beaucoup plus conséquents et plus difficiles à manier. »
L’aspect humain est également capital. « Quand l’entreprise n’a jamais produit en interne, il faut créer, en parallèle de la création de l’usine, une quinzaine de métiers différents avec des champs de compétences très variés : responsable logistique, responsable santé-sécurité-environnement, responsable méthode… ».
C’est pourquoi Expliseat a recruté très tôt un directeur de site expérimenté, capable d’accompagner les différentes phases du projet et de gérer à la fois l’aménagement et la production.
« Chaque mois qui passe sans produire sur le site, c’est de l’argent qui est dépensé (en loyer, RH, etc.) », rappelle-t-il. L’enjeu est donc fort sur le recrutement, l’intégration et la montée en compétences des équipes.
Anticiper l’exploitation, c’est donc gagner un temps précieux à l’ouverture, sécuriser la phase de démarrage, et optimiser la montée en cadence industrielle.
Votre première usine en Pays de la Loire : notre accompagnement
Découvrez l’Impact Program, un dispositif dédié pour vous accompagner dans la création de votre première usine :
- Recherche d’un bâtiment ou terrain adapté
- Soutien administratif et financier
- Intégration accélérée au sein des réseaux
- Aide au recrutement
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Crédits photos : © Region Pays de la Loire / Ouest Medias, © Expliseat